La justice restaurative ouvre le dialogue entre victimes et auteurs d’infractions
27 avril 2023 Non Par Annick PuvillandCi-dessus : image de l’affiche du film « Je verrai toujours vos visages » (2023)
À l’initiative du groupe justice restaurative de l’Ain, un ciné-débat a été organisé à Bourg-en-Bresse le 25 avril, pour éclairer ce dispositif précieux mais méconnu.
Droit ouvert à tout citoyen, introduit en France dans le code de procédure pénale via la loi du 15 août 2014, la justice restaurative permet à des auteurs d’infractions et des victimes – pas forcément concernés par la même affaire – de dialoguer afin de réfléchir à l’acte commis et à ses conséquences, et d’avancer ainsi ensemble sur le chemin, pour les uns, de la prise de conscience et, pour les autres, de la reconstruction.
Victimes, auteurs, professionnels de la justice, associations d’aide aux victimes… Tout le monde peut demander une mesure de justice restaurative, à tout moment de la procédure pénale, avant, pendant, après. Elle est mise en place par des professionnels formés – auxquels se joignent parfois des bénévoles –, qui accompagnent auteurs et victimes tout au long du processus.
Le dispositif fait ses preuves. Dans l’Ain, les expérimentations menées par le groupe justice restaurative depuis 2016 montrent qu’il produit des effets positifs, soulignait Sophie Dupuis-Fontaine (directrice générale adjointe de l’AVEMA 01, membre du groupe de l’Ain), en ouvrant le débat après la projection du film Je verrai toujours vos visages qui a fait salle comble le 25 avril, à l’Amphi de Bourg-en-Bresse. Les études menées dans le monde indiquent aussi un impact sur la récidive.
Justice restaurative dans l’Ain : un dispositif positif, mais qui manque de moyens
Pour autant, ce dispositif reste peu utilisé, peu connu et souffre cruellement d’un manque de moyens. À titre d’exemple, le ministère de la justice a alloué à l’AVEMA depuis huit ans, pour son développement dans l’Ain, au total 5 000 €, soit 625 € par an.
« En France, notre fédération France Victimes a mené, en 2022, 400 mesures de justice restaurative. Ce chiffre est ridiculement faible par rapport aux 2 millions de procédures engagées chaque année dans les tribunaux » rappelle Sophie Dupuis-Fontaine, en espérant que le film sorti sur les écrans en France fin mars et les débats tels celui-ci contribueront à sensibiliser les pouvoirs publics.
Ciné-débat autour de Je verrai toujours vos visages, un film reflet de la réalité
« Le film reflète vraiment la réalité de la justice restaurative, ce qu’on fait, ce qui peut se passer » soulignent les professionnels de l’AVEMA, de la PJJ et du SPIP** qui composent le groupe justice restaurative de l’Ain suite à la rencontre « ciné-débat » qu’ils ont organisé au cinéma L’Amphi, à Bourg-en-Bresse.
Mettant en lumière une mesure passant par une série de rencontres entre un petit groupe de victimes et d’auteurs d’infractions – d’affaires différentes mais concernant le même type d’infractions – et une mesure de médiation entre frère et sœur, il illustre tel un documentaire les étapes du dispositif, le travail mené par les professionnels, l’engagement des participants, leurs peurs, leurs doutes, leurs colères, leurs espoirs, leurs pardons, leurs émotions, leurs joies… On les suit avec autant d’émotion.
* Service pénitentiaire d’insertion et de probation
** Protection judiciaire de la jeunesse
Un partenariat actif
Dans l’Ain, le groupe justice restaurative réunit l’AVEMA France Victimes 01, le SPIP* et la PJJ**. Un partenariat qui fait « la spécificité et la force » du groupe, indiquent ses membres. L’action est formalisée par une convention de partenariat, signée également par le tribunal.
L’équipe compte huit personnes (psychologues, éducatrices, conseillères pénitentiaires d’insertion et de probation…) formées, d’autres sont en cours de formation. Sur le terrain, les mesures menées les plus courantes sont les mesures de médiation restaurative frère/sœur. Chacune est menée par un binôme de deux professionnelles – pour l’heure, les membres du groupe sont toutes des femmes.
En chiffres
En 2022, le groupe justice restaurative de l’Ain a effectué 16 mesures de médiation restaurative (au total, 242 heures de travail).
- 55 % concernaient des majeurs, 28 % des mineurs, 17 % des jeunes majeurs.
- 11 concernaient des infractions à caractère sexuel, 2 des violences intrafamiliales, 2 des vols avec violences, 1 tentative d’assassinat.
Pour en savoir plus
Article d’Annick Puvilland